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31.10.07

Le championnat de la Handler


Stéphane Le Beau (Canada) rode a nearly perfect race to take Gold in the 45-49 20km Points Race Final.
Photo ©: Mike Gladu


Le championnat de la Handler
Championnats du monde sur piste, Sydney 2007

texte de Candide Tremblay

Je dois l’avouer d’emblée, je n’aime pas la compétition. J’ai toujours trouvé qu’il y avait peu de bons gagnants et trop de perdants déçus. Pourquoi se placer volontairement en état de stress alors que la vie se charge si bien de nous apporter son lot de problèmes mais fort heureusement des solutions ! Pourtant j’aime le sport et l’effort physique intense. Je ne suis ni une sportive de salon, ni du dimanche. 5000 Kilomètres sur mon Opus Staccato 2007; le vélo, j’adore.

J’arrive au vélodrome, de l’autre côté de la planète, comme une intruse. Je partage avec tous ces gens la passion des 2 roues, mais je ne suis jamais montée sur une piste. Après 7 jours passés dans ce cirque de bois je suis conquise. Je les comprends enfin ces batailleurs de la vitesse. Je suis à la limite d’avoir le goût de faire comme eux.

Le monde des Maîtres est un monde d’adultes accomplis qui ont un passé, de l’expérience et un certain recul face à la victoire. Cela me fait espérer que c’est un monde propre. Pas de contrat de publicité à négocier, pas d’argent à obtenir, pas de carrière à envisager. La vie de tous les jours est ailleurs. À mes yeux, la performance n’en est que plus belle et plus vraie.

Tout au long de cette semaine se vit une une escalade d’émotions tant sur la piste que dans l’arène, là où se retrouvent les athlètes et leurs « Handlers ». Le mardi voit arriver une bande d’étrangers venus du même pays ou de continents différents. Le dimanche réunit des athlètes de toute nationalité qui ont eu le goût du dépassement.

L’activité intense qui se déroule dans le centre de la piste est fascinante. Les coureurs se regroupent naturellement par pays, certains arborant des maillots de leurs nations respectives, subventionnés peut-être par leurs fédérations. La délégation canadienne est bleue, blanche, rouge, verte, jaune. Une petite dizaine de solitudes… Les nombreux vélos accrochés sur les supports sa balancent par leurs selles ; le monde du cyclisme est si joliment coloré.

Il y a ceux qui se réchauffent sans arrêt, il y en a d’autres qui le font par étapes. Plusieurs se promènent avec des bouts de papiers mouchoirs imbibés de menthol dans le nez, quelques-uns se massent, tous sont fébriles. C’est palpable .Superstition par ci, effet placébo par là. Les athlètes me semblent des gens de routine, d’habitudes et de discipline. On peut aussi sentir et voir la concentration avant la montée sur la piste. Au centre, juste avant de grimper la rampe, ils sont là sur leurs montures à tourner comme des lions en cage, sans se regarder les uns les autres. Les jeux sont faits, les dés sont lancés, c’est avant qu’on devait décider combien de pignons, quel braquet, quelle roue on allait installer sur sa bécane. Elle a été pesée et le casque aérodynamique a été inspecté.

À la montée sur le cercle de bois incliné, ceinturé des lignes noire, rouge et bleue, il ne reste que la volonté, la force physique et la connaissance de la piste. C’est étourdissant de les voir tourner, leur vitesse est grisante, leur agilité déconcertante, leur souffrance et leur plaisir mélangés. C’est fantastique de vivre ça de l’intérieur.

Ce séjour a permis des rencontres inattendues. Il y a eu ce jeune Américain sympathique accompagné de Lisa et de Sydney, leur bébé naissant, ce Danois athlétique et intelligent, fin pistard, ces Italiens chaleureux venus féliciter le gagnant de la course, ces Français typiquement français – Ah le cousin canadien - qui partagent notre langue, cette Australienne inquiète, si reconnaissante de l’aide apportée par Stéphane pour changer son pignon et sa roue in extremis, juste avant sa course. Il y a eu nos compatriotes canadiens qui ont partagé leurs rouleaux de réchauffement, un casque et une roue prêtés, Keith et Norm qui ont accepté de faire équipe avec Stéphane, Scott qui a chronométré sa poursuite et Sara qui allait d’un côté à l’autre de la piste durant la Course aux points en hurlant des encouragements : « Go Go Steph ! You have to win …». Des étrangers avec qui on a fini par partager nos émotions, notre bouffe et nos adresses courriels.

Les derniers jours j’aperçois un maillot bleu de l’Italie porté par un coureur de l’Afrique du Sud, un Français avec un survêtement de l’Australie et Stéphane qui se retrouve avec le ‘’ skin ‘’ bleu d’un coureur de l’Argentine parce que ce denier voulait le rouge et blanc de Opus. Amusante cette coutume ! On croirait voir une bande d’ados échangeant leurs cotons ouatés.

Je ne crois toujours pas avoir en moi la fibre qui fait aimer la compétition mais je sais que cette semaine m’a appris beaucoup : connaissances sur les qualités physiques et tactiques des bons pistards, renseignements sur les caractéristiques de la piste, détails sur les différentes épreuves présentées. Mais j’ai surtout compris le plaisir de ceux qui aiment se mesurer aux autres, j’ai senti l’énergie qui les habite, j’ai été contente de ressentir de la camaraderie entre eux. J’ai vécu les réponses à mon questionnement.

Finalement je pense que dans une course il y a 3 gagnants mais aucun perdant.

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